
C’est dans le domaine de la justice que les dernières avancées ont été faites, des chercheurs du University College London (UCL) ont réussi à mettre au point un système d’IA capable de prédire si une plainte adressée à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) est recevable ou non, avec un taux de réussite de 79 %. L’objectif affiché est d’aider la Cour à faire face à l’explosion du nombre de dossiers à examiner et qui entraine des retards conséquents dans la prise des décisions de justice.
Pour comprendre l'intérêt de ce système, il faudrait savoir qu’en 2015, la CEDH a reçu le double du nombre de plaintes reçues l’année antérieure. Cet afflux croissant de procédures est dû à plusieurs raisons, notamment l’arrivée de nouveaux membres et l’importance grandissante que prend la CEDH dans les systèmes judiciaires européens. Selon les chercheurs, cette technologie pourrait automatiser le processus de l’analyse des plaintes et prioriser celles les plus susceptibles d'être reçues par les juges.
Le système d’apprentissage-machine a examiné des documents publics de la Cour liés à 584 cas de violation des articles 3 (interdiction de la torture), 6 (droit à un procès équitable) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme ratifiée par 47 États membres. Ces documents ont une structure distinctive, mettant en évidence d’abord la procédure qui a permis à la plainte d’arriver à la Cour, l’ensemble des faits et les circonstances, les lois pertinentes et les arguments légaux appliqués. Ensuite, pour chaque plainte, l’IA examine les allégations faites par les parties concernées et l’évaluation de leurs mérites par les juges, avant d’en conclure les dispositions opérationnelles. L’approche suivie par l’équipe de chercheurs est assez simple et s’appuie sur les avancées majeures réalisées dans le domaine de l’apprentissage de réseaux de neurones profonds. De cette façon, la machine a pu distinguer les aspects qui sont les plus susceptibles d'être en corrélation avec un verdict particulier.
L’équipe a pu se rendre compte que les décisions des juges découlent en premier lieu des circonstances spécifiques qui entourent chaque cas individuel et donnent une grande importance aux détails non légaux. C’est pourquoi l’équipe pense que des humains sont toujours requis pour trancher et prendre des décisions qui affectent les vies d’autres individus, une mission qu’on ne peut toujours pas confier à un ordinateur. « C’est comme lorsqu’on veut remplacer des instituteurs ou des docteurs par des machines, c’est impossible pour le moment », a précisé Vasileios Lampos, un chercheur de l’équipe. « Les lois ne sont pas assez structurées pour qu’une machine puisse prendre des décisions. Je pense que les juges ne suivent pas des règles spécifiques pour prendre une décision, et je peux dire en tant que citoyen et informaticien que différentes cours de justice ont des interprétations différentes des mêmes lois et cela arrive chaque jour. »
Pour le moment donc, il s’agit uniquement de juger la recevabilité des plaintes, ce qui reste néanmoins une décision très lourde sachant qu’en 2015, la CEDH a rejeté 43 100 plaintes. Les chercheurs estiment qu’il est dans l’intérêt des tribunaux de présenter les faits et les circonstances des plaintes de la manière la plus neutre possible, afin d’aider à filtrer les dossiers et de voir le degré de corrélation entre les verdicts et les plaintes déposées, une chose qu'il est impossible de savoir aujourd’hui.
Source : Motherboard
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