L’article L. 811-5 du code de la sécurité intérieure indique en effet que « les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions du présent livre [livre VIII sur le renseignement], ni à celles de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale. »
Pour l'exécution de ces mesures, le ministre de la Défense ou le ministre de l'Intérieur peuvent demander aux personnes physiques ou morales exploitant des réseaux de communications électroniques ou fournisseurs de services de communications électroniques, les informations ou documents qui leur sont nécessaires pour la réalisation et l'exploitation des interceptions autorisées par la loi. Mais en quoi cet article peut-il permettre aux autorités de collecter, enregistrer et écouter les communications sans aucune restriction ? Parmi les points évoqués pour soutenir la censure de l'article, on peut citer les suivants :
- les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer la surveillance et le contrôle des transmissions par voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions relatives au renseignement figurant au livre VIII du code de la sécurité intérieure. Or, ce sont ces dispositions qui définissent les techniques de recueil de renseignements et qui déterminent les voies de recours relatives à la mise en œuvre de ces techniques ;
- ces mesures ne sont pas non plus soumises aux dispositions de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale. Ici, il est également important de noter que les dispositions en question encadrent les interceptions de correspondances émises par la voie de communications électroniques prescrites par un juge d'instruction.
Autrement dit, l’article autorise des mesures de surveillance et de contrôle des transmissions par voie hertzienne « sans définir les conditions de collecte, d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements ainsi recueillis et sans prévoir aucun dispositif de contrôle de ces mesures ».
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel indique que les dispositions autorisées par l’article n’excluent pas que les communications ou les données individualisables puissent être interceptées. S’il est prévu que ces mesures soient prises « aux seules fins de défense des intérêts nationaux », rien n’interdit cependant que « ces mesures puissent être utilisées à des fins plus larges ».
« Il résulte de ce qui précède que, faute de garanties appropriées, les dispositions contestées portent une atteinte manifestement disproportionnée au droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances », conclut le Conseil qui a donc déclaré l’inconstitutionnalité de l’article et son abrogation.
Il faudra toutefois attendre jusqu’au 31 décembre 2017 pour que la mesure prenne effet, le temps également de mettre une nouvelle loi en place : « L'abrogation immédiate de l'article L. 811-5 du code de la sécurité intérieure aurait pour effet de priver les pouvoirs publics de toute possibilité de surveillance des transmissions empruntant la voie hertzienne. Elle entraînerait des conséquences manifestement excessives. Afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il y a donc lieu de reporter au 31 décembre 2017 la date de cette abrogation. »
Source : Conseil constitutionnel