Dans un entretien aux Echos ce lundi 12 septembre, la ministre de l'Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, a expliqué les raisons qui l’ont motivée à envisager une réforme du master pour l’année 2017. Elle rappelle notamment que « depuis la mise en place du dispositif LMD (licence-master-doctorat) en 2002, le diplôme de master avait vocation à sanctionner une formation de deux ans et à remplacer les diplômes préexistants de maîtrise, de DEA et de DESS. Mais la sélection qui existait à bac+4, c'est-à-dire à l'entrée du DEA et du DESS, a été conservée. Et elle se retrouve désormais au milieu de ce qui est devenu le master. C'est là qu'est l'incohérence. À l'époque, en 2002, un statu quo avait été négocié. La mesure était censée être transitoire, le temps que l'offre de formation se réforme véritablement. Mais ce compromis a installé une situation durable. À plusieurs reprises, la droite a tenté d'instaurer la sélection à l'entrée en master, comme réponse simple... ou plutôt simpliste à la situation. Cela a été le cas à deux reprises en 2007, avec des échecs à chaque fois. Ces tentatives ont échoué parce qu'elles ne s'appuyaient pas sur un consensus dans la communauté universitaire, sur une réflexion d'ensemble. Je ne veux donc pas de cette solution simpliste qui serait à rebours des aspirations des jeunes et des besoins du pays, et ne répondrait pas aux véritables enjeux d'une réforme du master ».
Pour mener à bien son projet, la ministre a lancé le dialogue avec les différents acteurs, notamment universités, organisations étudiantes et syndicales. Une collaboration qui, selon elle, semble progressivement porter ses fruits puisqu’elle déclare que « les conditions me semblent aujourd'hui réunies pour trouver un équilibre sur un dossier qui a toujours été présenté comme épineux ». La ministre ambitionne de faire évoluer le progrès dans deux sens : « d’abord, les universités doivent pouvoir recruter à l'entrée du master, et non pas en milieu de master, l'idée étant d'avoir un diplôme conçu comme un cursus de quatre semestres qui ne s'arrête pas en plein milieu, comme c'est le cas aujourd'hui. Et, en même temps, tout titulaire de licence doit se voir proposer une poursuite d'études en master s'il le souhaite. On ne peut en effet pas abandonner les étudiants qui veulent continuer après la licence, alors que ce diplôme ne suffit pas à s'insérer dans le monde professionnel ».
À la question de savoir s’il est possible de trouver un consensus alors que la Conférence des présidents d'université (CPU) dit avoir claqué la porte des négociations, elle a gardé son optimisme, précisant que les échanges continuent tout de même. La ministre évoque également des éléments qui peuvent probablement apaiser les esprits qui s’échauffaient : « Nous avons déjà agi en tenant nos engagements. Pour sécuriser la rentrée 2016, compte tenu des décisions de justice, nous avons adopté un décret en mai dernier qui permettait de sécuriser juridiquement l'organisation actuelle des masters, avec la possibilité de sélectionner à l'entrée de la deuxième année de certains d'entre eux. Mais nous avons toujours dit que cette solution ne pouvait qu'être temporaire et qu'il fallait repenser plus généralement le système et engager une véritable réforme du master. C'est ce que je propose aujourd'hui. Toutes les conditions sont réunies, et c'est très rare. Je pense que chacun prendra ses responsabilités ».
La ministre est claire : ce recrutement à l’entrée en master suppose de supprimer la sélection entre master 1 et master 2. Elle soutient « qu’entamer un cursus pour se heurter à une barrière au milieu, c'est incohérent et ce n'est pas acceptable pour les étudiants. Ensuite, comme personne n'est allé au bout de la réforme LMD depuis 2002, le fait d'avoir conservé cette barrière sélective entre M1 et M2 a empêché le LMD de se mettre en œuvre, et freiné la construction de véritables formations de masters de qualité adossés à la recherche, professionnalisantes, et déployées sur quatre semestres. Enfin, on sait que la réalité de notre système actuel c'est aussi, à certains endroits, par des délais particuliers ou des calendriers de dépôt des dossiers peu clairs, une sélection de fait qui pénalise les étudiants les moins informés. Face à cette situation problématique, et alors que le gouvernement ambitionne - ce n'est pas forcément la position de l'opposition - d'élever le niveau de qualification des jeunes, je souhaite nous donner les moyens de construire des vrais masters de deux ans qui permettent aux étudiants d'acquérir les connaissances et les compétences qu'on est en droit d'attendre à bac+5, pas d'entretenir un système qui conduit à bricoler des parcours. Il y a trop d'étudiants qui bricolent leur parcours ou redoublent artificiellement leur année de M1. Ce n'est pas normal ».
Pour le moment, les critères de recrutement à l’entrée en master n’ont pas encore été définis, mais la ministre souhaite que soient mis en place des critères objectifs, transparents, fondés sur la motivation, le niveau pédagogique et le projet de l'étudiant.
La question de l’endroit où s’exercerait la poursuite d’études (par exemple, un étudiant qui a obtenu sa licence à Brest, peut-il faire son master à Strasbourg sous cette réforme telle qu'elle est actuellement ?) est encore en débat. La ministre explique qu’entre autres l’orientation à l'entrée du master et le droit à la poursuite d'études pour les étudiants qui le souhaitent, à la fin de la licence, soulèvent en effet d'autres questions, comme celle de la mobilité géographique. Elle explique par exemple que, sur la table des négociations, les acteurs s’interrogent sur la raison qui explique que la mobilité géographique des étudiants entre les universités est si faible par rapport à d'autres pays.
Au final, elle espère voir une entrée en vigueur de cette réforme d’ici la rentrée 2017 : « les échanges avec les organisations ont commencé fin mai. Les principales organisations ont été reçues. L'idée est de finaliser une proposition courant octobre avec les différents acteurs, qu'elle puisse être soumise à la communauté universitaire et ensuite, si on trouve l'accord que je souhaite, qu'on puisse enclencher en novembre le processus juridique - avec une loi et un décret - pour que la réforme se mette en œuvre à la rentrée 2017 ».
Source : les Echos
Voir aussi :
Rentrée scolaire 2016 en France : le plan numérique est amorcé et apporte la programmation ainsi que ses enjeux dès le collège
France : la réforme du doctorat entrera en application dès septembre 2016, quelle en est la portée pour l'Université française ?
Réforme du Master : Najat Vallaud-Belkacem envisage une sélection en entrée au Master pour la rentrée 2017
Et promet une loi pour novembre
Réforme du Master : Najat Vallaud-Belkacem envisage une sélection en entrée au Master pour la rentrée 2017
Et promet une loi pour novembre
Le , par Stéphane le calme
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !